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Stage Acadie Québec 18 et 19 avril 2009 : Robert Bouthillier

Textes du répertoire travaillé lors du stage Acadie Québec animé par Robert Bouthillier les 18 et 19 avril 2009.

Robert Bouthillier

Robert Bouthillier
Photo Suzanne Porcherot

C’était un charbonnier

C’était un charbonnier, là-bas sur ces montagnes,
Il descendit à la ville d’Orléans,
C’était pour y vendre son charbon.

Charbonnier mon ami, combien vends-tu la tonne ?
Mademoiselle, je le vends quinze francs,
Un doux baiser en même temps.

Charbonnier, mon ami, aurais-tu le courage
De prendre un doux baiser sur un si beau visage ?
Mademoiselle, y’en a d’plus belles que vous,
Les charbonniers leur font la cour.

Charbonnier, mon, ami, prendrais-tu z-un p’tit verre ?
Mademoiselle, gardez-la donc pour vous,
Les charbonniers en ont toujours.

Charbonnier, mon ami, que ta chemise est noire !
Mademoiselle, ça dépend du métier,
Chemise noire, bon charbonnier.

Chanté par Clarens Bordeleau, de Saint-Côme (Québec), lors de la tournée « Gens du Québec » à Vancouver, en mai 1986.

Rossignolet du bois

Rossignole des bois, rossignole sauvage,
Apprends-moi ton langage, apprends moi z-à parler,
Apprends-moi la manière qu’il faut faire pour aimer.

La manière pour aimer, c’est d’aller voir les filles,
C’est d’aller voir les filles, souvent les embrasser ;
Un jour viendront qu’à dire : « Tu seras mon berger ».

Si tu es mon berger, tu goûteras z-aux pommes,
Tu goûteras z-aux pommes qu’il ya dans mon jardin,
Si tu m’emportes la lune et le soleil à la main.

Non je n’t’emporterai pas le soleil et la lune ;
La lune elle est trop haute, le soleil trop brillant,
Comment pourrais-je t-y faire pour y mettre la main ?

Va-t-en amant trompeur, grand amuseur de filles ;
T’as pris mon cœur en gage et-à présent tu t’en vas,
Traversant la rivière, galant tu périras.

Non je n’périrai pas, traversant la rivière
Je prie la sainte Vierge de m’conserver le jour,
Un jour viendra peut-être, unira nos amours.

Versions Clarens Bordeleau, Saint-Côme. Collecte R. Bouthillier, septembre 1985 et Vancouver 1986 [RBMD-montage, n° 10 et 63]. Synthèse cohérente.

Mon père n’avait fille que moi

Mon père n’avait fille que moi,
Tortillez-vous, fortillez-vous comme moi.
Encor sur la mer il m’envoie,
Tortillez-vous, fortillez, tortillez-vous, belle,
Tortillez-vous, fortillez-vous comme moi.
Encor sur […]
Le « marié » [marinier !] qu’il m’y menait
Il devient amoureux de moi.
Il dit : La belle, embrassez-moi.
Oh non ! monsieur, je n’oserais
Car si mon pâpâ le savait,
Qui s’rait battue ? ça serait-moi.
Qui donc la belle qui lui dirait
[Ce sont les oiseaux de ces bois.]
Les oiseaux des bois parlent-y ?
[Ils parlent français, latin aussi,]
[Ils parlent comme ils ont appris]

Les vers en italiques et entre crochets ne figurent pas dans les versions Bordeleau, mais ils sont d’une logique imparable pour la cohérence de l’histoire et figurent dans de nombreuses autres occurrences, Clarens chante une autre version, même texte de base, mais mélodie en majeur et refrains différents :

Mon père n’avait fille que moi, (bis+rép)
Encor sur la mer il m’envoie,
Des choux pis des melons,
Des pétaques pis des oignons
Et pis des groseilles
Pis encor un p’tit verre de vin, |
D’l’anguille et du boudin | (rép)
Du tabac, des allumettes. |

Collection Robert Bouthillier, nos 4482 et 4494. Chanté par Clarens Bordeleau, de Saint-Côme, le 7 septembre 1985, lors d’une veillée familiale à la salle paroissiale.

Le « moulignier »

Chez nous on l-avait fille que moi,
Là-bas sur la mer ils m’envoient,
Dl lam tl la lou dl la
Dl lam tl la lou dl la
Di dl lam ti dl li dam.
Là-bas…
Le moulignier qui m’emportait
Est dev’nu amoureux de moi :
Ma mignonnette, embrassez-moi.
Oh ! non, si papa le savait,
Fille battue je serais, moi.
Oh ! mais qui c’est qui lui dirait ?
Mais ce sont les oiseaux du bois.
Les oiseaux du bois parlont-ils ?
Oh ! oui vraiment, quand ils sont pris.
De quel langage qu’i’ parlont-ils ?
Parlont français, latin aussi.

AFEUL, coll. RBVL, enrg. nº 2565. Chanté par Alvina Saint-Pierre-Brideau, de Saint-Irénée (N.-B.), le 10 août 1977. Paru sur le CD Le miroir d’argent, plage 30.

Le passage du bois

Ah ! qui me passera le bois, moi qui suis si petite ?
Ce sera monsieur que voilà, n’a-t-il pas bonne mine ?
Attendez-donc, belle attendez, j’irai vous reconduire.

Mais quand le bois fut traversé, la belle se mit à rire.
Ah ! qu’avez-vous, belle qu’avez-vous, qu’avez-vous à tant rire ?

Je ris de toi, je ris de moi, de nos folles entreprises,
Et de m’avoir passé le bois sans petit mot me dire.

Ah ! revenez, belle revenez, je vous donnerai cent livres.
Ni pour un cent, ni pour deux cents, ni pour trois ni pour mille,
Il fallait plumer la perdrix du temps qu’elle était prise.

AFEUL, coll. RBVL, enrg. 153. Chanté par Marc Brien, de Sainte-Marie-Salomé (Québec), en décembre 1974.

Les filles de Repentigny

Sont les filles de R’pentigny,
Sur la ti dl li di dl lum(e) (2)
Sont les filles de R’pentigny, elles sont joli-es,
Elles sont jolies, oh ! gai,
Elles sont joli-es.

Elles s’en vont au cabaret boire chopine.
Elles en ont bu dix-huit coups, pintes et chopines.
Quand c’est venu pour payer l’écot des filles,
Elles avaient tous de l’argent hors la petite.
Ôtez lui son cotillon et sa coiffure.
Son amant passant par là connut sa mie.
R’mettez lui son cotillon et sa coiffure.
Qu’il n’en soit jamais parlé dans toute la ville.

AFEUL, coll. RBVL, enrg. 158. Chanté par Marc Brien, de Sainte-Marie-Salomé (Québec), en décembre 1974.

Nous étions trois capitaines

Nous étions trois capitaines, [bis]
De la guerre revenant, brave, brave,
De la guerre revenant, bravement.

Nous entrâmes dans une auberge :
Hôtesse, as-tu du vin blanc ?
Oui, vraiment, nous dit l’hôtesse, j’en ai du rouge et du blanc.
Hôtesse, tire-nous chopine, chopinette de vin blanc.
Quand la chopine fut bue, nous tirames trois écus blancs.
Grand merci, nous dit l’hôtesse, revenez-y donc souvent.

AFEUL, coll. RBVL, enrg. 206. Chanté par Marc Brien, de Sainte-Marie-Salomé (Québec), en janvier 1975.

Bonapâre

La ville de Paris, ah ! oui qu’alle est jolie,
Alle est jolie et parfaite en beauté,
Bonapâre, il faut l’attaquer.
Bonapâre a t-envoyé, oh ! i-un de ses gendarmes.
Grand général Bonapâre m’[a]envoyé
Si vous vouliez se rendre à lui.
Tu y’ est qu’un insolent de parler de la sorte ;
Va-t-en lui dire que je m’en fous de lui
Autant le jour comme la nuit.
Bonapâre fit crier son signale de guerre.
Le premier coup que Bonapâre a tiré,
La ville de France en a tremblé.
Tous les dames de la ville couraient sur le trottoire :
Grand général, apaisez vos canons,
Cent z-écus d’or nous donnerons.
Cent z-écus d’ore, mesdames, ne sont qu’une bagatelle,
Nous turerons les petits et les grands
Et nous prendrons l’or et l’argent.
Bonapâre fit greyer tout’s ses armes de guerre.
Le dernier coup que Bonapâre a tiré,
Oui la victoire lui a été donnée.

AFEUL, coll. RBVL, enrg. 142. Chanté par Hilaire Benoît, de Tracadie (N.-B.), en novembre 1974

La barbière

C’est dans Paris, y’a t-une barbière qu’est cent fois plus belle que le jour,
Allons-y donc, cher camarade, allons-y donc lui faire l’amour.

Oh ! bonjour donc, jolie barbière, la barbe nous la faireriez-vous ?
Oh ! oui, z-oh ! oui, brave gentilhomme, mes rasoirs sont toutt prêts pour vous.

Montez r-en haut dedans ma chambre là où je vais monter par derrière vous,
Vous asseoirez dans mon fauteuille là où repose mon ami doux.

Pendant que la barbière le rase le beau galant soupire d’amour.
C’est-il mes rasoirs qui vous blessent? Oh ! non, la belle, c’est vos amours.

Pour mes amours, bien gentilhomme, ils sont bien éloignées d’ici,
Ils sont sur la mer qu’ils naviguent, autant le jour comme la nuit.

AFEUL, coll. RBVL, enrg. 139. Chanté par Hilaire Benoît, de Tracadie (N.-B.), en novembre 1974

Dans Paris y’a t-une brune

Dans Paris y’a t-une brune mariée nouvellement,
Elle se mire et elle se coiffe dans un beau miroir d’argent,
Elle est noire, gaillarde noire,
Elle est noire gaillardement.
Elle se mire…
Elle appelle sa servante : Ma servante, venez céans,*
Dites-moi si je suis noire où si mon miroir m’y dément.
Eh ! [car] vous êtes un peu brunette, mais cela vous avient tant.
Jetant son miroir par terre, et maudissant tous ses parents,
Maudit son père et sa mère, son ami qu’elle aima tant.

AFEUL, coll. RBVL, enrg 69. Chanté par William Coutu, de Sainte-Émélie de l’Énergie (Québec), en novembre 1974

Le moine qui allait voir les filles

Ah ! c’était un moine qui allait voir o tantirelire,
qui allait voir o ouich tan ouich,
qui allait voir o ouich tan ouach,
qui allait voir o glinguelait,
qui allait voir Rita (rép)
qui allait voir Rita. (bis + rép)
Il la trouva seulette sur son lit qui…
sur son lit qui pleurait. […]
Qu’avez-vous donc la belle qu’avez-vous … à pleurer ?
J’ai t-un gros mal de tête et puis ben mal … au doigt,
J’ai t-un gros train à faire et puis dix vaches … à tirer.
Que donneriez-vous belle si j’irai … si j’vous les tirerais ?
Un doux baiser dit-elle pis un baiser su’l … un baiser j’vous donnerais.
Le moine il prit le pot, prit la chaudière… au lait.
Donne-moi ta patt’ Caillette que je tir’ de… ton lait.
Caillette était ginguette, elle a joué du… jarret.
Elle envoya le moine elle l’envoya su’l… sus l’dos dans le fossè.
Sa robe qui était noire était toute blanche… de lait.
Que l’diable emporte les filles qui auront mal… au doigt.

Autre fin :
Que l’diable emporte les filles qu’ont des vaches à tirer
Avec leur mal de tête et puis bien mal au doigt

Collection Allard-Bouthillier, n° 4. Chanté par Jean-Paul Guimond (65 ans), de Wotton, Cantons de l’est, Québec, le 26 octobre 1998. Chanson apprise de Dollard Pelletier, un voisin. Répondue par Gabrielle Bouthillier et Rosemarie Allard.

Boire à son tour

Il faut prendre un instant pour parler d’amourettes, (rép)
Jeannette s’en va t-au bois pour cueillir des noisettes,
Parler d’amour, boire à son tour,
Boire à son tir lir lir, |
Boire à son tour lour lour, | (rép)
Boire à son tour. |

Jeannette s’en va […] (rép)
En cueillit trop longtemps, qu’elle sait plus où les mettre.
Un chasseur de ces bois, la reconduit chez elle.
Une fois rendu chez elle, allumer la chandelle.
Grand vent du nord se lève et souffle la chandelle.
Les voilà tous les deux, les deux dans les ténèbres.
Ne craignez point la belle, je vous serai fidèle.
Si vous craignez la bell’, j’rallum’rai la chandelle.

Collection Allard-Bouthillier, no 5. Chanté par Jean-Paul Guimond (65 ans), de Wotton, Cantons de l’est, Québec, le 26 octobre 1998. Chanson apprise de Lomer Crête, un voisin. Répondue par Gabrielle Bouthillier et Rosemarie Allard.

Je m’en vas t-à la chasse

Je m’en vais à la chasse, à la chasse pour chasser, (bis)
J’me cache derrière un arbre pis j’attends le gibier.
Sur la ritonton laritaine, sur la ritonté larité (bis)

J’me cache derrière […]
Quand je les vois venir, je suis prêt z-à tirer.
Je tire les uns les autres sans jamais [l’z-]attraper.
Quand je reviens le soir, j’vais voir ma fiancée.
Elle me demande toujours : — Mais qu’as-tu rapporté ?
Je n’rapporte pas grand chose, j’peux pas les attrapper.
Ils font comme vous la belle quand j’veux vous embrasser :
Ils font deux p’tits sauts croches pis se tirent de côté.

Collection Rosemarie Allard et Gabrielle Bouthillier, nº 99.04.B.02. Chantée par Jean-Paul Guimond (65 ans), de Wotton, Cantons de l’Est, le 24 janvier 1999.

Timatou

Par un beau matin, je me suis levée, (bis+rép)
J’entends le rossignol chanter,
Timatou matou dl lou,
Timatou matou dl lin,
Timatou matou retou dl la la tour lour lour,
Timatou matou dl lou dl la la tour lour lin.

J’entends […]
Dans son langage il me disait :
Les femmes mariées ne valent rien,
Et les jeunes filles encore bien moins,
Et les garçons, on n’en parle point,
Les hommes mariés ont tous des biens.

Chanté par Mme Anita Bordeleau, de Saint-Côme. Coll. Monique Jutras, n° 124 (ca 1984-1985)

Texte « moyen » (sur la base de plusieurs versions québécoises différentes) :

J’ai descendu dans mon jardin
Pour y cueillir du romarin.
J’en avais pas cueilli trois brins
Qu’un rossignol vint sur ma main.
Il m’a dit trois mots en latin,
Ces trois mots-là, j’les compris bien :
Que les jeunes filles ne valent rien,
Les femmes mariées, encor bien moins,
Quant aux garçons, on n’en dit rien,
Ils ont toujours le verre en main
Pour saluer leurs chères catins.

Rossignole des bois

Rossignole des bois, rossignole volage,
Apprends-moi la manière, apprends-moi t-à parler,
Apprends-moi la manière qu’il faut faire pour aimer.
La manière pour aimer, je m’en vais te le dire.
C’est d’aller voir les filles, et plus souvent leur parler
Et voici la manière qu’il faut faire pour aimer.
Je passe et je repasse, belle devant votre porte,
Vos paroles sont trop sévères, la belle, méfiez-vous d’ça,
Vous en aimez un autre, ah oui ! ça je le sais.
Si j’en aime z-un autre, ce n’est pas d’vos affaires,
Il n’est ni beau ni riche, pas plus charmant que vous,
Si l’amour me transporte, je l’aim’rai mieux que vous.
Oh belle, oh jolie blonde, remets-moi mon mouchoir-e,
Il est haut dans ma chambre au chevet de mon lit,
Le soir-e quand j’y pense, je pleure et je m’ennuie.
Ce n’est plus temps la belle, de regretter ses fautes,
C’est par un dimanche au soir que vous m’avez refusé,
Il n’est plus temps la belle de me faire demander.

Chanté par Anne-Marie Savard, de Baie-Sainte-Catherine (Charlevoix, Québec) en mars 2009. Coll. Robert Bouthillier et Éva Guillorel.

La femme qui voulait empoisonner son mari (Dame Lombarde – Version Cécile Duguay)

Oh bonjour donc, mon matelot,
Enseignez-moi don’,
Enseignez-moi don’ d’la poison
Pour empoisonner, ah oui, mon mari.
Pour empoisonner mon mari
Qu’est jaloux de moi,
Pour empoisonner mon mari
Qu’est jaloux de moi, qu’est jaloux de moi.
Allez sur cett’ montagn’ rocher,
Vous en trouvèrez,
Vous trouvèrez (u)n’ têt’ de sarpent,
Vous la mouderez, vous la mouderez.
Dans un moulin d’or et d’argent
Vous la mouderez,
Quand vot’ mari arriv’ra du champ,
Grand soir qu’il aura, grand soif qu’il aura.
Quand son mari a (a)rrivé du champ,
Grand soif qu’il avait :
Ah ma charmante, jolie (I)sabeau,
Vid’-moi don’ de l’eau, vid’-moi don’ de l’eau.
Ce n’est pas de l’eau qu’il vous faut,
C’est du bon vin doux.
Tant que la jeun’ dame en vidait,
Du vin noir c’était, du vin noir c’était.
Tant que le jeun’ dame en vidait,
Du vin noir c’était.
Son p’tit enfant qu’est là dans l’berceau
Qui l’avartissait, qui l’avartissait.
Son p’tit enfant qu’est là dans l’berceau
Qui l’avartissait :
Mon cher papa, buvez-en don’ pas,
Ça vous f’ra mourir, ça vous f’ra mourir.
Mon cher papa, buvez-en don’ pas,
Ça vous f’ra mourir.
Ah ! maudit soit, oh ! matelot,
Qu’il m’a t-enseigné de vous fair’ mourir.

Version Cécile Duguay, de Saint-Wilfred (Northumberland), N.-B. AFEUL, coll. RBVL n°1629, enregistré le 19 septembre 1976.

La courte paille

Voilà sept ans qu’on l-est sur mer-e [bis] sans pouvoir la terre aborder,
Prenez courage, sans pouvoir la terre aborder,
Prenez courage, beau marinier. [bis]

Au bout de la septième année, [bis] l’eau (z-)et les vivres nous ont manqué.
Il faut tirer la courte paille, lequel de nous sera mangé.
La courte arrive au contre-maître.
Ça s’ra don’ moi qui s’ra mangé.
Je fis (t-)app’ler mon Jean, mon page :
Ti-Jean, mon page, venez t-ici.
Montez z-en haut dedans les hunes et regardez de tous côtés.
Mais quand il fut dedans les hunes, se mit à rire et (z-)à chanter
C’est-i’ la mort-e de ton maître qui te fait rire aussi chanter ?
Je vois la ville de Babylone, et les pigeons s’y voltiger ;
Je vois ma très chère sœur Margu’rite qui nous prépare z-à manger.

La bergère en pleurs dans un lieu solitaire (versions comparées Ben / Hilaire Benoît)

C’était t-une bergère,
Ses yeux fondiont z-en pleurs ;
Dans un lieu solitaire
Racontant d’son malheur :
Dis-moi, z-amant fidèle,
Quoi j’m’en vas devenir ?
Tu m’as trahie, quelle malheure,
Et moi j’m’en vas mourir
J’ai jamais (é)té si bonne
Assis sur un gazon ;
Amant, tu m’abandonnes,
Sans aucune raison.
Tu vois coulér mes larmes
Qui sont des larmes chessantes,
Tu te plaindras, amant fidèle,
De m’avoir fait mourir.
Un jour viendra peut-être,
Amant tu m’voiras plus.
Amant, je te f’rai voire
Un regret surperflu.
Tu voiras mon image
Qu’il te fera gémir ;
Tu te plaindras, amant fidèle,
De m’avoir fait mourir.
Dans ce lieu solitaire
Où j’ai tant (é)té de fois,
Sur la verte fugère
Pour accomplir tes lois,
Les oiseaux du bocage
Qu’ils m’entendont gémir ;
Tu te plaindras, amant fidèle,
De m’avoir fait mourir.

Chanté par Ben Benoît, de Tracadie (N.-B.) AFEUL, coll. R. Matton, 1957 ou 1958

C’était z-une bergère,
Ses yeux fondèr’nt t-en pleurs ;
Sour ces vartes fougères
Récontraitt son malheur :
Dis-moi, z-amant fidèle,
Quoi j’m’en vas devenir ?
Tu m’as trahie, et mon malheure,
Et moi je vas mourir
J’ai jamais (é)té si bonne
Assis sur un gazon ;
Galant, tu m’abandonnes,
Dis-moi pour quelle raison.
Tu vois coulér mes larmes
Qu’ils sont des larmes d’or,
Tu te plaindras, amant fidèle,
De m’avoir fait mourir.
Dans un lieu salutaire
Où j’ai tant (é)té de fois,
Sour ces vartes fougères
Pour accomplir tes droits,
Les oiseaux du bocage
Qu’ils m’attendaient gémir ;
Tu te plaindras, amant fidèle,
De m’avoir fait mourir.
Un jour viendra peut-être,
Amant tu m’voiras plus.
Galant, je te f’rai voire
Un regret surparfu.
Tu voiras mon image
Qu’il te fèra gémir ;
Tu te plaindras, amant fidèle,
De m’avoir fait mourir.

Chanté par Hilaire Benoît, de Tracadie (N.-B.) AFEUL, coll. RBVL, enrg nº 138, novembre 1974.

Margotte s’en va-t-en guerre

Margotte s’en va-t-en guerre,
L’habit en haut, la Saint-Bardondaine
Margotte s’en va t-en guerre, savoir quand c’qu’il viendra,
Vivié, vivia, hourra
Oh ! la Saint-Bardondaine, savoir quand c’qu’il viendra.
[z-]Il reviendra z-à Pâques, à Pâques, éternité.
L’éternité se passe, Margotte ne revient pas
J’ai t-envoyé mon page savoir quoi c’qu’il fait là.
[z-]Oh ! bonjour don’ mon page, quelles nouvelles m’emporta ?
Les nouvelles que j’t’emporte, tes doux yeux vont pleurer
Monsieur Margotte est mort-e, z-il est mort, [t-]enterré.
Je l’ai vu port[er] en terre par trois, quatre officiers :
I-un qui portait son sabre, [z-]et l’aut’ porte son épée.
Qui s’qui port’ra son deuille, c’est Monsieur le curé
Avec sa grand robe noire et son bonnet carré.
Au milieu de sa tombe, z-un rossignol chantait.
Il dit dans son langage : La belle se mariera
[z-]Avec un vieux sauvage tout noir, tout barbouillé.

Chanté par Ben Benoît, Tracadie (N.-B.). AFEUL, coll. Roger Matton, (nº à vérifier), ca 1957-1958

Embarque dans mes souliers

Embarque dans mes souliers, sur le lundi, mardi, jour de mai,
Embarque dans mes souliers, je vas faire la grand-d’mande,
je vas faire la grand-d’mande, oh ! gai,
je vas faire la grand-d’mande.
Son père en est content, […] sa mère en est contente.
Lundi sera la noce, mardi sera la danse.
C’est mercredi z-au soir qu’nous coucherons ensemble.
Dans un grand lit carré toute couvert en dentelle.
Aux quatre coins du lit, les verres et la bouteille.
Mais au milieu du lit, le galant et la belle.
Mais en dessous du lit, une claire fontaine.
Où à tous les matins, son canard il se baigne.
Il s’sauce la tête à l’eau p’ensuite il bat des ailes.

Chanté par Henri Sonier, 67 ans, de Val-Comeau, Sheïla, co. Gloucester, N.-B., le 26 juillet 1976. Ne sait pas de qui il a appris cette chanson. Transcription légèrement « nettoyée ». AFEUL, coll. RBVL, n° 1776

Rossignol des verts bocages

Rossignol des verts bocages,
Rossignol des amoureux,
Va-t-en porter r-une lettre
À ma tant charmante Lisette
Qu’est couchée sur son lit couvert de fleurs.

Rossignol a pris cette lettre,
Dans son becque l’emporta ;
Droit au logis de la belle,
Compose une chanson nouvelle
Et la belle fut réveillé’.

S’sont-ils mes amants, dit-elle,
Qu’ils font des chansons sur moi ?
Oui s’sont vos amants, la belle,
Qu’ils vous sont ainsi fidèles,
Qu’ils font des chansons sur vous.

Laissez parler, laissez dire,
C’est un cas de jalous’rie.
J’aimerai c’qu’il m’aime, qui m’aime,
J’aimerai celui qui m’aime,
J’aimerai c’qu’il m’aimera.

Je vas partire dimanche,
J’emporte rien avec moi
Je voudrais vous faire demande
Un billet de souvenance,
La belle, je me souviendrai de toi.

Un billet de souvenance,
Tu-l n’a i-eu assez de moi :
Tu as i-eu une de mes roses,
Une de mes plus belles roses,
Oh ! que j’avais dans mon rosier.

Jolie rose, tant jolie rose,
Toi qui m’coûte cher aujourd’hui :
Tu-l me coûte double, double,
Tu-l me coûte cinq fois double,
La valeur de cent z-écus.

Cent z-écus n’est pas grand chose,
Mon honneur encore bien plus ;
Mon honneur, mon avantage, |
Tu as eu mon cœur en gage, | (bis)
Et à présent, et tu t’en vas. |

AFEUL, coll. RBVL, enrg. nº 2896. Chanté en 1977 par Jean-Baptiste Gionet, de Bas-Caraquet, co. Gloucester, N.-B. Version légèrement normalisée

La fille d’un geôlier

C’était la fille d’un geôlier, |
Grand Dieu ! qu’elle était belle, | (bis)
Elle est si belle, elle fait le tour, |
Un prisonnier lui fait l’amour. | (bis)
De bon matin, la belle se lève,
S’en va de sur le juge,
Elle se jeta à ses genoux :
Ayez pitié du prisonnier !
Le juge la prit par sa main blanche :
Oh ! levez-vous la belle ;
Il est jugé, il en mourra,
Un autre amant qu’i vous faudra.
Un autre amant je n’en veux pas,
Qu’a répondit au juge,
Un autre amant je n’en veux pas,
Je veux mourir entre ses bras.
Si vous voulez vous marier,
Mariez-vous, la belle,
Si vous voulez vous marier,
Rien qui n’en sera parlé.

AFEUL’ coll. Bouthillier-Labrie, n° 3076. Chanté par Suzanne Brideau, Saint-Isidore, N.-B., 1977. Ed. sur le CD Le Miroir d’argent, plage 10.

L’anneau de la fille tuée

Dans mon chemin j’ai fait rencontre
Cinq ou six méchants cavaliers,
Z-i m’ont d’mandé : – Mademoiselle,
Passez-vous c’te chemin-ci toute seule ?
Je l’ai passé z-et repassé,
Dieu Tout-Puissant m’a conservée,
Si que le Dieu de Gloire veut m’conserver,
Je le passerai z-encore à soir-e.
Nous faut l’habit que t’as sus toi
Z-et l’anneau d’or t’as dans le doigt.
Oui, de grand cœur, je vous le(s) donne,
Mais ne touchez pas à ma personne.
Quand c’que ça v’nu sur la ménuit,
Que les voleurs faisont leur bruit,
S’est écriée : – Miséricorde !
Ah ! les voleurs m’coupont la gorge.
Z-ils avont ‘té frapp(er) à la porte
Du maîtr’ de la fille qu’était morte ;
Z-il’ ont d’mandé-ze le coucher
Lend’main matin, le déjeuner-e.
Quand c’que ça v’nu sur le départ,
Que tout’ chacun paye leu’ part,
Le p’us vieux fourre sa main dans ses trouses,
Laiss’ timbe l’anneau d’la fille à terre.
Le vieux qu’avait le pied légère
Ramasse l’anneau qu’était z-à terre,
Z-en lui disant : Ceci,
C’est l’anneau d’or-e de ma fille.
Vous ne sortirez pas d’ici
Avant j’aille des nouvelles de ma fille.
[Le plus jeune des cinq s’(a)avancé
En lui disant : Monsieur l’hôtelier-e]
Le plus jeune des cinq s’(a)avancé
En lui disant : Monsieur l’hôtelier,
Si vous voulez m’donner vie sauve,
Je vas déclarer tous les choses.
Votre fille nous l’avons tué’, (bis)
Nous avons pris son p’tit cœur volage,
Nous l’avons couvri de feuillage.

AFEUL, coll. RBVL, nº 2684. Chanté par Pascal Leclair, Haut-Sheïla (N.-B.), 1977.

Les Menteries

M’en vas vous chanter une chanson mais elle est pas courte ni longue
Si y’a un mot d’vérité dedans moi je veux qu’ma vie y passe
Di dl la dl la di dl lam
Di yum dl la dl li dl lam
Di dl la dl la di dl lam
Di yum da dl li dam

J’ai pris mes deux bœufs dans mes poches et ma charrue sur ma tête
Je m’en ai ’té pour labourer i-où c’qu’i y’avait pas de terre
J’ai labouré six seillons mais dedans les six semaines
J’en ai semé de l’avoine elle [ça] venait comme une tempête
J’ai trouvé c’t’un vieux ch’val mort qu’il mangeait mon avoine
J’i ai coupé les quatre pattes il fuyait comme une poudre
Dans mon chemin j’ai rencontré c’est un âbre de prunelles
J’ai pris z-une perche je l’ai grâlé pis ça tombait comme d’la faîne
Z-il m’en a tombé i-une sus l’pied qui m’a cassé la cervelle
Par dessour la plante du pied z-ils me voyiont la cervelle
La chatte qui est dans l’coin du feu pis qui soignait la lessive
Elle a voulu goût[er] à la sauce pis elle s’est brûlé les griffes
Les mouches qui (est) au plafond pis qui s’éclataient de rire
Il en a tombé une en bas pis elle s’est cassé la cuisse

Chanté par Henri Sonier, Sheïla (N.-B.). Coll. RBVL-1184, 1976

Les Pelletier

Écoutez la complaint’ que j’m’en vas vous chanter
Tout’ le mond’ s’intéress’ de l’entendre chanter
Elle a ‘té composée sur la mort de deux hommes
Sur Germain et Henri, tous deux je vous les nomme.
Partir’nt de l’île au Banc pour aller s’engager
Croyant d’fair’ la travers’ sans aucun accident
Croyant d’fair’ la travers’ sans doute ni sans crainte
La chaloupe a versé en dédoublant la pointe.
Deux hommes forts et capabl’s se sont déshabillés
Croyant de fair’ la terr’ comme ils savaient nager
La mer toute entêtée redouble sur leur tête
A fallu s’y noyer avant de fair’ la terre.
Ils ont fait la recherch’ c’est pour trouver Germain
Le prêt’ s’en est mêlé car il savait trop bien
Ils ont trouvé Germain noyé sur le rivage
Sa blond’ le réconnut en voyant son visage.
Ils ont fait la recherch’ c’est pour trouver Henri
Ont cherché sur la côte jusqu’à l’heure de ménuit
Aussi sa pauvre femm’ qui redouble ses peines
De voir traîné au fond le seul que son cœur aime.
Hélas quel triste sort pour un’ mère chérie
De voir traînés au fond, noyés ses deux chers fils
C’est Dieu qui l’a voulu comme il voulut bien d’autres
Aujourd’hui c’est leur tour, demain ça s’ra le nôtre.
La complainte a ‘té fait’ le saint jour d’la Toussaint
En mil huit cent quatorz’ sur ces deux pauvres défunts
J’espèr’ viendra un jour si Dieu me fait la grâce
J’espèr’ dans l’autre monde d’y-en avoir ma récompense.

Version synthétique à partir des versions de Lætitia Comeau (RBVL 1257) et Édouard Benoît (RBVL 1264)

La misère dans les chantiers

Z-écoutez tou’, mes bons amis, vous qu’il viv(ez) à votre aise,
M’en vas vous chanter le récit de nos plus grandes misères,
Z-on peut z-avoir dans ces chantiers pendant des longues hiver-e-s,
Z-à travailler, r-à s’ennuyer par des froids si sévères.
Quand faut partir pour ces santiers, il faut laisser nos femmes,
Il faut laisser pareillement ce qu’il nous est plus cher-e
Pour rester seul dedans le bois pendant des longues hiver-e-s.
Vous savez tout’s, mes bons amis, dans l’bois faut travailler-e
Faut travailler sans cesse, le saint jour d’la Toussaint, aussi les autres fêtes,
Le Jour de l’An pareillement, notre maît’ le réclame,
Si Dieu n’a pas pitié de moi, je crains pour ma pauvre âme.
C’est par un beau dimanche matin dans une année nouvelle,
N-étant couché sur du sapin pour dessiper nos peines ;
Pour composer cettre chanson il faut verser des larmes,
C’est en pensant z-à ma maison et à ma tendre femme,
Z-à mon enfant pareillement, lui qu’est auprès d’sa mère,
Qui prie le Dieu soir et matin pour son malheureux père.
C’est en finissant ma chanson quand même que c’est dimanche,
Il faut que je lave mon butin z-avant qu’les poux nous mangent ;
Considérez, mes bons amis, que c’est une vie z-étrange
Quand qu’il faut laver son butin seulement les dimanches.
C’est à vous aut’, mes jeunes garçons, qui caressent la bouteille,
Vous deveriez prend’e exemple sur moi, z-épargnez vos misères ;
Pour mieux conserver votre argent, z-évitez les aubarges,
C’est de pouvoir restér chez vous quand vous aurez des femmes.
Astheure que ma chanson est finie, passez-moi la bouteille,
Que je salue la compagnie en saluant ma belle.

AFEUL, coll. RBVL, n° 243. Chanté par Henri Sonier, Val-Comeau (N.B.), 1975

La belle au coeur tendre…

Je lui ai dit : Charmante belle |
Tu n’as plus d’amitié pour moi, | (bis)
Tu n’as plus d’amitié pour moi,
Z-après m’avoir tant fait de promesses,
Tu n’as plus d’amitié pour moi,
Z-après m’avoir promis la foi.
La belle qui n-avait le cœur tendre
Les larmes lui coulèrent des yeux
Moi qui es t-un garçon généreux
Tout doucement je m’approchis d’elle
J’ai mis la main sur son genou :
Petit cœur doux, consolez-vous.

J’ai t-un petit voyage à faire
Cinq ou six mois, z-une an t-au plus
Cinq ou six mois, z-une an t-au plus
La belle si tu voulais m’entendre
M’entendre jusqu’à notre retour
On y-accomplira nos amours.

(J. Ouellet, La Tourelle, 1941 ?) (Disque Songs of French Canada, Folkways FE 4482, plage A-08)

Le long d’un bois je me promène,
C’est un soir en me promenant.
Dans mon chemin j’ai rencontré
Un autre amant z-avec la belle,
Dans mon chemin j’ai rencontré
Un autre amant à son côté.
Là je lui dis : — Charmante belle,
Tu n’as plus d’amitié pour moi,
Tu n’as plus d’amitié pour moi
Après d’m’avoir fait des promesses,
Tu n’as plus d’amitié pour moi
Après m’avoir promis [d’abord]. [??]
La belle qui avait le cœur tendre,
Les larmes ça lui coulait des yeux.
Moi, garçon si généreux,
Tout aussitôt j’m’approchai d’elle,
J’ai mis ma main sur ses genoux :
Petit cœur doux, reconsolez-vous.
Comment veux-tu qu’j’me reconsole,
Vous qui s’en va si loin de moi ?
Vous qui s’en va si loin de moi
Après d’m’avoir fait des promesses,
Si tu reviens dans quelques jours,
Tous deux ‘ccomplirons nos amours.
J’ai t-un petit voyage à faire
Cinq ou six mois, z-au plus un an,
Cinq ou six mois, au plus z-une an.
La bell’ si tu-l voudrais m’entendre, [sic]
Si je reviens dans quelques jours,
Tous deux ‘ccomplirons nos amours.
La belle a bien v’nu me conduire
Jusqu’à bord de l’embarquement.
Mettez vot’ pied sur le vaisseau
Mais tout le long de la rivière.
Quand ç’a venu pour dire adieu,
Tous deux avaient les larmes aux yeux.
La belle se renferme dans sa chambre,
Nuit et le jour fait que pleurer.
Nuit et le jour fait que pleurer
En regrettant le seul qu’on aime,
Nuit et le jour fait que pleurer
En regrettant son bien-aimé.

RBVL 2292 Onésime Brideau [et Honoré St-Pierre], Saint-Irénée (N.-B.), juillet 1977

C’est dans la Nouvelle-de-France

C’est dans la Nouvelle-de-France
Oui, ya des charmants appâts ;
Quand j’m’en vas la voir sus y-elle,
Vraiment, oui, j’ai du malheur :
D’un côté je crains sa mère,
De l’auter côté j’crains sa sœur.
Me v’là d[on’]assis à la table,
Ma bouteille auprès de moi ;
Dans ma main, je tiens mon verre,
Sur mes genoux, ma Clorie,
Mon auter main ma bouteille,
J’en boirai tout en ma vie.
Ma maîtresse qu’est si chagrine,
Dit que j’en bois trop souvent ;
C’est pour déssipér les peines,
Belle, que j’ai en vous aimant,
Permettez, oui, que j’vous aime,
Non, belle, j’en boirai pas tant.

Toutt’ les oiseaux du boucage
Z-ambandonnont le troupeau ;
Z-ils s’en allont près du rivage [piduriage ?]
L’long de ces coulants russeaux,
L’amour fait plus de carnage
Que cent loups d[an’]un troupeau.
Me v’là don’ pour rester fille,
Vraiment, oui, j’ai eu malheur
D’y faire la difficile
Auprès d’un amant constant,
Ça-l m’y prendra plus facile
Auprès d’un amant chéri.

Version Pascal Leclair, Saint-Pons (Sheila), Nouveau-Brunswick, août 1977. AFEUL, coll. RBVL, n° 2681

La malheureuse boisson

La malheureuse boisson,
Toi qui n-est la mère du démon ;
Mais toi qu’il n-est souvent la cause
Mais de toutes ces damnations.
Mais quand c’qu’un homme a dans la tête
Z-un objet de cette boisson,
Z-il pourrait-il avoir d’autre chose
Que d’en avoir une méchante raison ?
Le dimanche est notre messe,
À toutes les mois, c’est not’ communion.
Tout le monde de la tempérance,
Z-il me fait t-une grande procession.
Notre curé qu’il montre en chaire,
Qui nous fait des longs sermons,
I’essaye bien de nous faire accroire
Que le diable est dans la boisson.
Mais vous descendrez dans sa cave,
Z-et vous n-en trouverez des gallons.
Z-et moi-même, si je m’f’rais prêtre,
Mais z-un prêt’, c’est pas mon nom :
Je n’suis méchant sur la terre
Et je l-aime beaucoup la boisson.

AFEUL, coll. RBVL, enrg. nº 384. Chanté par Didyme Benoît, de Leech (Sheïla), N.-B., en juin 1975.

Le prince Eusèbe

Un jour le prince Usèbe, un jour dedans Paris,
Il fut conduire trois dames, vive le jour,
Tout droit à leur logis, vive la fleur de lys.
Quand il fut à la porte : Coucheriez-vous ici ?
Non, non, non, non, mesdames, j’m’en r’tourne à mon logis.
Quand il fut sur ces côtes, regardit derrière lui,
Il vit venir vingt hommes, ses plus grands ennemis.
Te souviens-tu Usèbe, un jour dedans Paris,
Devant le roi, la reine, un démenti tu fis ;
Aussi devant sa chambre, un soufflet tu donnis.
C’est aujourd’hui, Usèbe, qu’il faut venger ceci.
Le vaillant prit son arme, le vaillant se battit ;
Il en tua quatorze auparavant d’mourir.
Quand il fut au quinzième, son épée se rompit.
Ah ! vitement, beau page, prêtez-moi votre épée.
Oh ! non, non, non, beau prince, j’ai trop peur de mourir.
Va-t-en dire à ma femme qu’elle n’a plus de mari.
Aussi à ma nourrice qu’elle prenne soin de mon fils,
Quand il sera t-en âge, il vengera ceci.
Fera bâtir un temple au milieu de Paris
Fera brûler un cierge en l’honneur de ceci.

Chanté par Alphonse Morneau, de Baie-des-Rochers (Charlevoix, Québec). AFEUL, coll. Roger Matton, ca 1957-1958. Version publiée sur un disque produit par le Ministère de l’Éducation du Québec à l’intention des enseignants du français au secondaire. Reprise depuis par Michel Faubert sur son album « Maudite mémoire ».

La belle qui fait la morte pour son honneur garder

Dans la ville de Paris, (i)l’y a t-une princesse,
Il y a t-une princesse plus belle que le jour,
Trois braves capitaines qui va lui faire l’amour.
Le plus jeune des trois la prit par sa main blanche :
Montez, montez, la belle, sur mon cheval-e gris,
À Paris je vous mène dans une hôtellerie.
Mais quand nous fûmes rendus là-bas dans cet hôtel-e :
Soupez, soupez, la belle, avec bon appetit,
Avec un capitaine vous passerez la nuit.
Finissant ces paroles, la belle a tombé morte :
Sonnez, sonnez, les cloches, sonnez bien doucement,
Car voilà ma mie morte, j’en ai le cœur dolent.
Nous la ferons enterrer, cette aimable princesse,
Dans le jardin d’son père là où nous l’avons pris ;
Nous prierons Dieu pour elle qu’elle aille dans l’paradis.
Son père se promenait tout le long de sa fosse :
Ouvrez, ouvrez ma tombe, mon père, si vous m’aimez,
Trois jours je fais la morte pour mon honneur garder.

Chanté par Alphonse Morneau, de Baie-des-Rochers (Charlevoix), sur le disque 33 tours 30 cm Acadie et Québec, RCA, CGP 139 (série « Gala »), face B, plage 3.

La bergère et le vieillard

Oh j’ai pris ma roulette
[Et mes deux] chalumeaux,
J’m’en ai (é)té sus l’herbette
Pour jouer des airs nouveaux,
Charmante Lisabeau,
Charmée de mon temps,
En laissant ses sabots
Pour danser sur l’ormeau.
Oh par icitte lui passe
Un bon vieillard* bonhomme,
En disant : — Mon bargér,
Votre amant est revenu,
Pour vous mon bargér
C’est d’la compagnie,
Pour vous mon bargér
Que ça vous f’ra plaisir.
La bergère (lu)i respond :
Le soleil nous éclaire,
Ah dis-moi, mon vieillard,
Pourquoi ta compagnie,
Pourquoi ta compagnie
Pour moi me f’rait plaisir ? Le vieillard lui respond :
J’ai quatre mille francs,
Tu (en) seras la maîtresse
À toi z-heureusement,
Toi z-et tes parents
Z-ils viveront contents.
La bergère qui est fine
Z-elle a pris cet argent,
En faisant bonne mine
[Et dans ces] positions,
Dans le même instant
Z-elle a pris sa roulette,
S’en a ‘té dans les champs
Pour rejoindre son amant.
Le bon vieillard bonhomme,
I s’a mis t-à pleurer
En disant : Ma friponne,
Tu m’as bien attrapé !
C’est dans notre village,
Si le monde le savait,
Le tour que tu m’as fait,
Tout le monde en rirait.

AFEUL, coll. Roger Matton, ca 1957-1958. Chanté par Ben Benoît, de Tracadie (N.-B.)

L’âne de Ti-Jean

Quand Ti-Jean s’en va dans l’bois,
Trouve les quat’ pattes de son âne
Que les loups aviont dragué,
Carillonnez.
(parlé) Pattes, pauver pattes !!
Tu ne port’ras plus de fers, carillonnette,
Ni de fers, ni de crampons, carillonnons.

Quand Ti-Jean […]
Trouve la tête de son âne […]
Tu ne port’ras plus de bride […]
Ni de bride, ni de bridon […]

[…] Trouve les machoir’s de son âne […]
Tu ne mang’ras plus d’avoine […]
Ni d’avoine, ni de chiendent […]

AFEUL, coll. Roger Matton, ca 1957-1958. Chanté par Ben Benoît, de Tracadie (N.-B.)

Par derrière chez mon père – La claire fontaine

Par derrière chez mon père, je me suis promené
Sul ‘bord de la fontaine, je me suis reposée,

Ohé !
Il y a longtemps que je t’aime,
Jamais j’vas t’oublier.

Sul ‘bord de la fontaine, je me suis reposée,
J’ai trouvé l’eau si belle que je me suis baigné,

J’ai trouvé l’eau si belle que je me suis baigné,
À la plus haute branche le rossignol chantait,

À la plus haute branche le rossignol chantait,
Chant’, rossignole chante, toi qu’a le cœur si gai,

Chant’, rossignole chante, toi qu’a le cœur si gai,
Tu as le cœur à rire, moi, je l’ai t-à pleurer,

Tu as le cœur à rire, moi, je l’ai t-à pleurer,
J’ai perdu ma maîtresse, c’est d’avoir trop parlé,

J’ai perdu ma maîtresse, c’est d’avoir trop parlé,
Je voudrais que la belle fut à mes g’noux tombée,

Je voudrais que la belle fut à mes g’noux tombée,
Je voudrais que la rose fut à-à mon côté,

Je voudrais que la rose fut à-à mon côté,
Et ma charmante belle fut dans mon lit couchée,

Et ma charmante belle fut dans mon lit couchée,
Par un baiser de bouche que je l’ai réveillée,

Par un baiser de bouche que je l’ai réveillée,
J’ai perdu ma maîtresse, c’est d’avoir trop parlé.

Collection Harry Oster, chanté par Alma Barthélémy, Louisiane, 1957. Publié sur le coffret CD Louisiana Folk Masters. Women’s Home Music, disque 1, plage 1 (produit par The Archives of Cajun and Creole Music, University of Louisiana at Lafayette, 2007.)

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