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Copyright : ©2019 – Evelyne Girardon
Cette présentation fait la synthèse de plusieurs cours, communications, échanges, recherches, signés :
René Zosso, Anne-Marie Deschamps, Giovanna Marini, Dominique Vellard.
En France et en Europe, on entend par modalité le système musical savant, centré autour du concept de mode, qui s’est développé en Europe, de l’époque carolingienne (751 au X eme siècle) à la Renaissance (1300 à 1600).
Dans les musiques populaires européennes, la liturgie chrétienne a été un des éléments majeurs de l’environnement musical des populations majoritairement rurales de l’Europe depuis 15 ou 16 siècles.
Cette liturgie, d’origine culturelle orientale, a probablement marqué profondément la culture musicale des populations rurales, sociétés de l’oralité, jusqu’au XIX° siècle en France.
Il n’est donc pas étonnant d’observer en permanence des influences de la modalité grégorienne dans la culture mélodique des populations rurales, à la fois dans les répertoires de liturgie populaire et chansons profanes.
Le mode (dans sa conception scalaire) est la manière d’être d’une mélodie envisagée sous l’angle de la constitution de l’échelle et de la qualité donnée aux divers degrés. Il se caractérise par la place des tons et des demi-tons, ainsi que par les intervalles qui séparent les degrés forts.
La musique modale est monodique et s’exprime en hauteur relative (indifférence à la hauteur réelle, absolue). La modalité est inséparable de la notion de tempéraments …
Les modes se caractérisent par leur ambitus (intervalle compris entre le son le plus grave et le son le plus aigu d’une mélodie. Ne pas confondre avec la tessiture, qui est l’étendue moyenne dans laquelle une voix ou un instrument évolue avec aisance.)
Cet ambitus, dans la théorie grégorienne, est limité à l’octave. Mais ces octaves modales datent en réalité du 10ième siècle et, si toutes les théories se fondent sur elles à partir du 11ième siècle, elles ne sont cependant qu’une fiction née de la systématisation nécessaire aux pédagogues; très peu de mélodies présentent un ambitus rigoureusement égal à l’octave.
La possibilité d’une note bourdon, par sa présence continue, va renforcer la différenciation des degrés. Chaque degré est en interaction avec la fréquence fondamentale de la fréquence du bourdon, mais également avec chacune des fréquences harmonique du son bourdon, qui forment elles-mêmes un « accord permanent ».
Des règles de construction mélodiques, érigées en systèmes théorisés plus ou moins complexes, ordonnent les manières de faire se succéder les différents degrés du mode au cours de l’interprétation.
Dans les répertoires traditionnels chantés, on retrouve les structures modales présentes dans les répertoires liturgiques « anciens ». Cela a été souligné par plusieurs grands collecteurs comme Marius Barbeau, Marguerite et Raoul d’Harcourt, Maurice Emmanuel et bien d’autres.
Ces mélodies traditionnelles peuvent être analysées par le biais des modes (qu’ils soient scalaires ou formulaires) dans leurs formes complètes mais aussi comme « noyau de couleur » pour certaines mélodies qui, par ailleurs peuvent présenter d’autres notes que celles de l’échelle définie. Cette analyse nous permet de mieux servir l’interprétation de ce répertoire.
Chaque mode nous donne des ambiances et des couleurs différentes.
Pourquoi certains ont-ils disparus ? Déjà au Moyen Âge, on considérait que pour chanter un organum (voix parallèles), le mode de MI et le mode de FA ne sonnaient pas très bien…
Donc, lors des premières polyphonies, on se basera plutôt sur les autres modes.
Dans les chansons traditionnelles, (hors des recherches polyphoniques de la musique savante) certains modes « évincés » ont perduré, à la lecture des quelques notations de collecteurs et surtout sur l’écoute des collectages enregistrés.
Avant les possibilités d’enregistrer, l’ensemble du répertoire a été collecté par des musiciens, des lettrés qui ont abordé ces répertoires par le philtre de la musique tonale, celui de leur formation musicale. C’est pourquoi ils ont noté les hauteurs réelles des mélodies, même chez celles et ceux qui étaient conscients de la couleur modale (comme Marguerite et Raoul d’Harcourt qui ont noté les collectes de Marius Barbeau au Québec).
Les sociétés qui ont construit leur culture musicale sur la modalité ont des capacités culturelles à ressentir des nuances d’expressivité très fines dans les domaines de la hauteur des degrés, et de l’art de la variation mélodique et du mélisme (ornementation vocale). Les personnes issues de ces sociétés auront beaucoup de mal à comprendre les systèmes musicaux qui s’appuient sur l’harmonie, la tonalité. Il existe de nombreuses culture mixtes, qui font cohabiter aisément sentiment modal et harmonie.
« Les bourdons, accordés en quinte (en général !), sont les axes de toute musique modale, même lorsqu’ils sont sous-entendus, car le musicien les situe et l’auditeur en aura donc lui-même une certaine conscience. Loin d’être une seconde voix rudimentaire, ils structurent l’espace sonore dans lequel évolue la mélodie.
La modalité, ce sont les différentes manières de couper cet intervalle de quinte qui régit le répertoire ancien, ce sont les différents chemins pour aller d’un bourdon à l’autre, les différentes échelles entre ces deux bourdons. Il y a en gros, 16 – 17 modes plus ou moins répertoriés et chaque mode a un« ethos » particulier.
Bien que chez nous cela ne soit pas codifié comme en Inde, par exemple, chaque personne arrive à définir ce que chaque mode évoque pour elle. Plus encore que l’échelle elle-même, il me semble que le plus important est la réthorique par rapport aux bourdons (le jazz n’a retenu dans les modes que la notion d’échelle) : il s’agit de la manière dont chaque note d’une échelle sonne par rapport à ces axes linéaires horizontaux. Donc, d’abord, il s’agit pour celui qui pratique, de la compréhension intime de ce que cela implique pour lui. La modalité c’est la monodie, c’est un art de soliste avec une infinité de possibilités d’expression. D’autres cultures reposent aussi sur la modalité, même si c’est avec un certain nombre de différences. Pénétrer dans notre monde modal occidental, c’est en même temps une porte qui s’ouvre sur toutes les autres musiques modales, donc les autres cultures. »
« Le fait de chanter donne une approche différente de la mélodie, qui est plus dans la rhétorique modale. Quand on est instrumentiste, la plupart du temps, on n’a qu’une seule grammaire à respecter : la grammaire musicale. Dans le chant, on en a deux : il faut porter le texte, ainsi que la mélodie intrinsèque à ce texte. Ça ne veut pas dire que l’un soit plus important que l’autre. Les deux vont de paire, et il faut donc jouer entre ces deux grammaires. »
René ZOSSO – Interview CMTRA Évelyne Girardon – 2000
« La notion de mode n’est pas UNE notion, valable pour tous les temps et tous les pays. Elle s’est transformée au cours des siècles de telle manière qu’on ne peut la définir qu’en fonction de l’époque et du lieu ou on l’examine. » Jacques Chailley – L’imbroglio des modes.
« En 1636, Marin Mersenne écrivait déjà à propos des modes : « Peu importe comme on les nomme, pourvu qu’on les entende. »
François Picard – Échelles et modes, pour une musicologie généralisée.
« La majeure partie des contresens provient (…) d’une tendance naturelle (…) à appliquer rétrospectivement à des conceptions anciennes des notions qui leurs sont postérieures ». Jacques Chailley – L’imbroglio des modes.
« Il est à peu près impossible d’harmoniser selon les principes de l’harmonie classique, fondée sur la consonance à 3 notes, des mélodies construites hors de ces principes, à moins d’en dénaturer la signification, ce que beaucoup font allègrement (accompagnement de chant grégorien, harmonisation de mélodies anciennes ou non occidentales, hybridation des répertoires asiatiques, etc) »
Jacques Chailley dans « Éléments de phylologie musicale » 1985 (Alphonse Leduc)
Comment nos oreilles modernes perçoivent-elles cette forme musicale alors que rien dans nos repères musicaux n’y répond plus?
La notion d’intervalles n’est plus la même, les échelles de sons sont totalement différentes, les conceptions rythmiques aux antipodes. La notion d’harmonie, au sens où nous l’entendons maintenant est absente, le chromatisme n’existe pas, la fixation du diapason arrivera beaucoup plus tard et nous ignorons à quoi pouvait correspondre une hauteur réelle.
Niant toute référence à la tonalité et au tempérament égal ainsi qu’à la carrure rythmique, cette forme musicale modale se présente comme une simple monodie. Sa richesse ne vient pas d’une surcharge harmonique ou d’une abondante orchestration mais de sa liberté mélodique et de la subtilité de sa rythmique.
La perception adéquate de la monodie modale, par conséquent, requiert impérativement une oreille orientée vers une dimension successive du langage sonore, alors que nos habitudes auditives modernes sont plutôt axées sur une saisie simultanée des sons appartenant à un même accord.
La conception modale des rapports musicaux est très sensiblement éloignée de la conception tonale qui est pratiquée dans le monde occidental depuis le 18ième siècle. La notion d’intervalle, c’est-à-dire la distance entre les notes étaient entendue en termes d’échelles de notes et non d’accords.
Toutefois, des harmonisations à plusieurs voix sont attestées avant le 11ième siècle. Elles ne sont pas construites sur les accords à trois notes que nous pratiquons depuis l’âge classique, mais généralement sur des rapports simultanés de quinte, d’octave et de quarte. La tierce en est exclue, les voix évoluent en parallèle.
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« Musicalement, il y a tout le temps le bourdon, exprimé ou sous-entendu. » René Zosso
« Tout fonctionne dans le système des rapports harmoniques du son fondamental. » Anne-Marie Deschamps
En grégorien, on employa pendant longtemps le terme « ton » à la place de « mode » En réalité, le ton est un mode placé sur un degré déterminé de l’échelle musicale: par exemple, notre ton moderne de RÉ Majeur est en fait un ton de RÉ mode de DO. Le ton se caractérise donc essentiellement par la finale et le mode par les intervalles qui le composent.
La hauteur des sons
Il n’y a pas de hauteur absolue. Le diapason est une invention du 18ième siècle, imposée en France en 1859 et universalisé quelques décennies plus tard. Il ne faut donc surtout pas, dans l’interprétations des pièces, chercher à respecter la hauteur absolue des notes écrites, mais il est nécessaire de choisir le degré de départ qui correspond le mieux aux voix dont on dispose.
Nicolas Meeùs, né en 1944, est un musicologue belge, docteur en musicologie de l’université catholique de Louvain (1971), habilité à diriger des recherches de l’université Paris-Sorbonne (1993).
Il ne serait pas possible, de donner fût-ce une définition générale de la modalité, englobant l’ensemble des phénomènes qui peuvent relever de ce concept. Tout au plus peut-on relever deux points de vue, qui comportent chacun deux aspects complémentaires ou contradictoires :
La modalité est un moyen de description
1. Un moyen de classification.
C’est dans ce sens qu’on peut classer telle ou telle mélodie grégorienne dans tel ou tel des huit modes ecclésiastiques, telle ou telle pièce tonale dans le mode majeur ou le mode mineur.
2. Un moyen d’analyse.
La modalité prétend dire quelque chose de la structure profonde de la musique, de la même manière que la tonalité (en tant que description théorique) dit quelque chose de la structure profonde du répertoire tonal.
3. La modalité concerne l’organisation des hauteurs musicales
Selon des échelles et des gammes.
Ce sont les « octaves modales » du chant grégorien, les gammes majeure et mineure, etc., considérées en tant qu’elles définissent les structures d’intervalles des mélodies. La modalité ainsi conçue est une modalité « scalaire », fondée sur des échelles.
Selon des tournures ou des formules mélodiques caractéristiques.
C’est dans l’analyse des musiques ethniques que ce point de vue est dominant, bien que nous le rencontrons aussi à propos du chant grégorien. Par opposition au point de vue précédent, la modalité est ici « formulaire », fondée sur des formules mélodiques caractéristiques.
« La conception primitive semble bien avoir été celle du mode formulaire. Encore vivante en Orient (râga hindou, maqam arabe etc.), elle disparut sans doute plus ou moins en Grèce après Platon, qui semble s’y référer.Mais on la retrouve dans la musique religieuse byzantine et dans le plain-chant primitif (timbres d’antiennes, etc.). C’est un ensemble complexe qui comporte une échelle caractéristique, mais souvent aussi – et surtout – un ensemble de conventions permettant de l’identifier facilement, et ceci quelles que soient les variations que lui font subir les interprètes, plus ou moins improvisateurs : schéma mélodique déterminé, formules connues d’avance, registre vocal ou instrumental, agréments caractéristiques, procédés spéciaux d’interprétation, de style, de timbre, etc. » Jacques Chailley – L’imbroglio des modes.
« La modalité est une invention de théoriciens qui ont constaté un certain état de fait à une certaine époque. La notion de modalité ressort d’une pratique, la musique subit une évolution et à un moment de celle-ci, les théoriciens analysent en comparant avec ce qui se passe ailleurs. Ils ont regroupé la musique en fonction d’un certain nombre de façon “spontanées”de la faire : ce sont les “modes”. Mais ces “façons” existaient bien avant d’être répertoriées. D’autre part, une fois le répertoire observé selon les “modes”, on ne peut que constater que celui-ci est “construit”,”inventé”, la musique qui va suivre sera très différente car elle sera créée en fonction de notions théoriques, elle sera beaucoup moins mélismatique car les mélismes échappent aux modes. » Anne Marie Deschamps – Abbaye de Bassac – 1990
Solmisation
Méthode consistant à chanter les notes à l’aide de syllabes, permettant de reconnaître les qualités des intervalles, de discerner les tons et demi-tons. Les syllabes de la solmisation ne correspondent pas à des hauteurs fixes mais qualifient la situation de chaque note. .
Méthode de pédagogie musicale élaborée au XI ème siècle, consistant à chanter les notes à l’aide de syllabes ou voix (« voces »), permettant de reconnaître les qualités des intervalles. Les syllabes de la solmisation ne correspondent pas à des hauteurs fixes mais qualifient la situation de chaque note les unes par rapport aux autres. (Science de la musique – sous la direction de Marc Honegger – Bordas)
La corde de récitation (ou corde récitative)
L’intervalle séparant la finale de la corde récitative (le mot « dominante » qui prendra sa place ne date que du XVIIe siècle) définit la catégorie du mode : il est d’une quinte pour les authentes (sauf pour le 3e mode ou le si a glissé au do); quant à la corde récitative des plagaux, elle est située une tierce sous la teneur des authentes de même finale.
Le grand intervalle entre finale et corde récitative dans les modes authentes permet de caractériser en outre ceux ci comme des modes « élancés » et les plagaux ou la corde récitative est plus proche de la finale, comme des modes plutôt « recueillis ».
Tonique
C’est la référence constante des notes mélodiques, tous les sons de l’échelle seront perçus en rapport avec celle-ci, et prendront une valeur différente selon l’emplacement du degré polaire.
Avant ce terme, on utilisait celui de « finale » et ce n’est que par extension analogique que le mot « tonique » est désormais également appliqué à la première note des divers modes grégoriens.
La tonique est la note centrale et essentielle d’une mélodie, représentant le pôle de repos, en opposition à la corde récitative (dominante) représentant le pôle de tension.
La tonique est le premier son de l’octave type. L’idée de juger un mode d’après sa finale n’est formulée avec netteté qu’au 11ième siècle.
Un document incontournable à consulter : Le DVD « Penser Modal » de René Zosso : « Approche théorico-pratique de la modalité occidentale. Ce DVD présente, en 4 heures, son stage-conférence et résume, au long des bourdons de sa vielle, l’essentiel de sa pensée et de son analyse.
Ce document, est un véritable guide dans ce système musical souvent méconnu.
De nombreux exemples chantés et quelques bonus en facilitent l’accès.
Coup de coeur Académie Charles Cros 2018
« Le premier travail de désintoxication nécessaire à l’étudiant qui aborde l’histoire de la musique après une formation classique (laquelle demeure indispensable par ailleurs) est de faire table rase des données solfégiques et harmoniques héritées d’un passé trop récent pour être valable aux époques anciennes » Jacques Chailley, Cours d’histoire de la musique, Tome 1.
C’est un système musical différent, il doit donc être transmis avec une pédagogie particulière.
Nous ne parlerons pas de hauteur réelle (en solfège classique le nom d’une note désigne une hauteur réelle et définie : LA = 440 Herz).
Dans le système modal, il s’agit de valeur relative. Nous parlerons donc de solmisation (hauteur relative) et non de solfège (hauteur réelle)
Musicalement, il y a tout le temps le bourdon, exprimé ou sous-entendu.
Les bourdons, accordés en quinte (pour les modes authentes), sont les axes de toute musique modale, même lorsqu’ils sont sous-entendus, car le musicien les situe et l’auditeur en aura donc lui-même une certaine conscience. Loin d’être une seconde voix rudimentaire, ils structurent l’espace sonore dans lequel évolue la mélodie.
« D’abord simple artifice de classement, la finale finit par acquérir les prérogatives d’une véritable tonique, les autres degrés se concevant par rapport à elle. Ce caractère est déjà virtuellement acquis dans la majorité du répertoire dit grégorien, au sein duquel va se former peu à peu la conception qui aboutira aux Modes Écclésiastiques, qu’on appellera « grégoriens » à la fin di XIX eme siècle. L’idée de juger un mode d’après sa finale n’est formulée avec netteté qu’au Xieme siècle (Guy d’Arezzo).
La notion de finale développe parallèlement la notion de « dominante » (corde récitative), note pivot de la mélodie au-dessus de la finale conclusive. Le mot ne date que du XVII eme siècle : la chose découle de l’analogie avec la teneur, tenue psalmodique des récitations chantées. La dominante n’est pas toujours à la quinte de la tonique : elle n’est telle que dans les modes authentes, et encore avec des fluctuations quand elle tombe sur le SI, demeuré longtemps note mobile. Pour les modes plagaux, elle est à la tierce ou à la quarte. » Jacques Chailley – L’imbroglio des modes.
La notion de tonique, ou même de finale conclusive, n’apparaît que progressivement.
Une chose importante, dans DO RÉ MI FA SOL LA SI DO, il y a un ton entre chaque note sauf entre MI FA et SI DO ou il y a un demi-ton. Comme par hasard, au niveau mnémotechnique ce qui est intéressant, c’est que dans les deux cas, la note inférieure du demi-ton, c’est un I (MI SI).
Savoir chanter les intervalles de tons et demi-tons en partant du même son de base :
DO RÉ MIFA SOL LA SIDO
RÉ MIFA SOL LA SIDO RÉ
MIFA SOL LA SIDO RÉ MI
FA SOL LA SIDO RÉ MIFA
SOL LA SIDO RÉ MIFA SOL
LA SIDO RÉ MIFA SOL LA
S’entraîner à reconnaître la différence entre Tierce mineure et Tierce majeure.
Pour les quintes, nous pouvons, à partir d ‘un bourdon, faire entendre le premier son harmonique audible en dehors de l’octave, avec cet avantage de l’entendre avant de le chanter.
On peut aussi travailler en montant et descendant l’espace de sixte en passant par les sous toniques.
Savoir distinguer, à l’oreille, les pôles de repos, les relances « dynamiques » de la mélodie.
Repérer le « bourdon », qui n’est pas forcément facile à repérer, qui est généralement le pôle de repos.
Dans la progression des échelles produites par le cycle des quintes, et qui va du ditonique (2 notes par octave) à l’heptatonique (7 notes), le stade dit pentatonique (5 notes) est l’un des plus importants. Répandu sur toute la surface du globe (on l’appelait autrefois à tort « gamme chinoise »), présent jusque dans l’infrastructure modale du grégorien, il correspond à une « gamme » sans demi-tons (dit anhémitonique).
DO RÉ FA SOL LA DO
RÉ FA SOL LA DO RÉ
FA SOL LA DO RÉ FA
SOL LA DO RÉ FA SOL
LA DO RÉ FA SOL LA
« Tout fonctionne dans le système des rapports harmoniques du son fondamental. »
(Anne-Marie Deschamps)
« L’ethnomusicologie nous fait découvrir l’immense paysage des traditions orales dont les couches stratifiées permettent de reconstituer des millénaires d’évolution »
(Jacques Chailley, Éléments de philologie musicale)
« Si j’insiste sur la comparaison avec les modes de la campagne, ce n’est pas tant pour remonter jusqu’à nos racines que pour redécouvrir une façon de faire de la musique qui soit communication. Atteindre, à partir de l’univers des mots, celui des sons, retrouver la faculté du récit et mettre à son service le langage musical » (Giovanna Marini).
« L’examen musical de nos chansons nous a montré que celles-ci utilisent, sans aucun chromatisme, l’échelle diatonique de 7 degrés que comporte notre gamme et cela sous des formes modales distinctes » (D’Harcourt, Chansons folkloriques françaises au Canada)
« L’étude de toute cette musique paysanne fut pour moi d’une importance capitale, car elle m’amena à comprendre comment je pouvais me libérer totalement de la tyrannie du système majeur-mineur qui avait eu cours jusque – là » (Béla Bartok.)
« Il est à peu près impossible d’harmoniser selon les principes de l’harmonie classique, fondée sur la consonance à 3 notes, des mélodies construites hors de ces principes, à moins d’en dénaturer la signification, ce que beaucoup font allègrement (accompagnement de chant grégorien, harmonisation de mélodies anciennes ou non occidentales, hybridation des répertoires asiatiques, etc) »
Jacques Chailley dans « Éléments de phylologie musicale » 1985 (Alphonse Leduc)
Bourdon : Sciences de la musique – Marc Honneger – Éditions Bordas
Le terme apparaît en Europe médiévale tout d’abord avec le sens de grondement d’un son grave. De là, il s’adjoint divers sens musicaux qui expriment tous, bien qu’avec des nuances diverses, le phénomène acoustique produit par un son grave.
Dante (poète, homme politique et écrivain florentin né en 1265) emploie le mot de « bordone » pour évoquer l’accompagnement par un son soutenu lorsque, à l’entrée du poète au paradis terrestre, il parle d’un chant accompagné par le bourdon régulier du frémissement des feuilles.
« Burdo » ou « bordunus » apparaissent pour désigner la note qui est tenue dans l’organum à deux voix de l’École de Notre Dame (L’École de Notre-Dame est un groupe de compositeurs ayant exercé à Paris entre 1170 et 1250) et comme appellation du système de bourdon propre à certains instruments de musique (vielle à roue, cornemuse).
En France, la cornemuse a été appelée « muse au grand bourdon ».
Jérôme de Moravie (théoricien de la musique dans le milieu intellectuel parisien du XIIIe siècle) emploie le terme pour désigner une corde de la vièle située à l’extérieur du corps de l’instrument et qui fait entendre un même son résonnant par sympathie.
Selon des témoignages exclusivement littéraires, le terme « burdon » s’appliquait en Angleterre, à la voix grave qui tient le chant dans une musique à plusieurs voix improvisée. Il y apparaît régulièrement en relation avec une voix médiane et une voix supérieure.
Le bourdon : Note tenue, finale ou dominante du mode, qui sert de référence à la mélodie.
(Dominique Vellard)
Ison (isokratina) :
Note tenue, sur la fondamentale du mode sur laquelle se développe la mélodie. Ison littéralement, signifie « égal » : la voix ne produit pas de mouvement ascendant ou descendant. Procédé utilisé surtout dans la musique grecque, qui adjoint de longue tenue qui mettent en valeur et clarifient la structure modale de la mélodie. Son usage n’est pas réservé à la seule musique orthodoxe, il s’est généralisé dans toute la musique religieuse occidentale, particulièrement dans le chant dit grégorien (ou l’on employait aussi le terme teneur).
(Dominique Vellard – Lycourgos Angelopoulos)
L’harmonie sonore du Moyen Âge demeure d’essence mélodique.
« La mélodie n’est autre que l’harmonie » affirme le théoricien Johannes Tictoris au XV° siècle, alors que pourtant, la polyphonie a depuis longtemps supplanté la monodie. L’harmonie mélodique se manifeste, traditionnellement, dans la succession des notes unifiées par le mode. Ce dernier guide leur parcours autour du degré maître : tonique, que la théorie dénomme « finale » parce qu’elle conclut la mélodie. La tonique modale possède la fixité inhérente à la notion de « centre » ou « pôle » (CF Bourdon) : elle symbolise l’Un, le Principe, le Soi, même si nul auteur médiéval ne le précise explicitement. Le mode traditionnel et médiéval est une harmonie statique que la mélodie déploie selon une mobilité « horizontale ».
Toutes les musiques du monde fonctionnent ainsi, en accord avec le statisme de la consonance elle-même. Le flux éparpillé des sons mélodiques trouve dans la stabilité du cadre harmonique, consonant, le principe de son unité formelle, de sa cohérence, de sa signification.
Graphisme © : Nicolas Castellan 2005-2008