Julien Tiersot, Atlas sonore 18 : les Textes du CD

La bergère aux champs

Bergère aux champs

Y a rien de si charmant
Que la bergère aux champs.
Ell’ voit venir la pluie,
Désire le beau temps.
Voilà comm’ la bergère
Aime à passer son temps.

Son berger va la voir
Le matin et le soir.
“Oh ! levez-vous, bergère !
Bergère, levez-vous.
Les moutons sont en plaine,
Le soleil lui partout.”

Quand la bergère entend
La voix de son amant,
Ell’ met sa jupe rouge,
Son joli cotillon,
S’en va-t-ouvrir la porte
À son berger mignon.

“Berger, mon doux berger,
Où irons-nous garder ?
Là-haut sur la montagne,
Le soleil y fait beau ;
Cueill’rons la violette,
Le romarin nouveau.

Berger, mon doux berger,
Qu’aurons-nous à manger ?
Des perdrix et des cailles
Et de petits gâteaux ;
Du vin de la bouteille
Que j’ai sous mon manteau.

Berger, mon doux berger,
Où irons-nous loger ?
Là-haut sur la montagne
Un beau château l’y a :
Nous logerons ensemble
Parlera qui voudra.

Berger, mon doux berger,
J’entends quelqu’un marcher.
C’est peut-être mon père
Qui vient pour me chercher ;
Couchons-nous sur l’herbette
Et laissons-le passer.

Berger, mon doux berger,
Si quelqu’un nous voyait !
Allons dessus l’herbette
À l’ombre d’un buisson,
Filant ma colognette,
Chantant une chanson.”

La Péronnelle

La Péronnelle

Av’ous point vu la Pérronnelle
Que les gendarmes ont emmenée ?
Ilz l’ont abillée comme ung paige :
C’est pour passer le Dauphiné.

Elle avoit trois mignons de frères,
Qui la sont allez pourchasser.
Tant l’ont cherchée que l’ont trouvée
À la fontaine d’un vert pré.

“Et dieu vous gard, la Perronnelle !
Vous en voulez point retourner ?”
“Et nenny vraiement, mes beaulx frères ;
Jamès en France n’entreray.

“Recommandez moy a mon père
Et a ma mère s’il vous plaist”.

Le Beau conscrit

Beau conscrit

“Je viens te faire mes adieux
Avec regret, ma Rosalie.
Je viens de tirer la milice,
J’ai attrapé le mauvais sort.
Cela me causera la mort
De te quitter, ma Rosalie.

Mon cher amant, que dis-tu là ?
En te voyant, je fonds en larmes.
Il en faut parler à mon père,
S’il a de l’or et de l’argent :
C’est pour te faire un remplaçant ;
Qu’il sacrifie ma fortune.

Pour de l’argent, j’en ai assez,
Mais je suis trop de belle taille.
J’ai parcouru ville et village,
Par tout pays aux environs,
J’n’en ai point trouvé d’aussi grand :
Ma Rosalie, faut que je parte !”

Le lendemain au point du jour,
J’ai rencontré mon capitaine.
“Bien le bonjour, mon capitaine,
Je vous apporte de l’argent :
Sera pour faire un remplaçant ;
Je le ferai quoi qu’il m’en coûte.

Monsieur, la loi nous le défend
De remplacer de si beaux hommes.
Nous vous mettrons de la Garde Impériale,
Vous entrerez dans ce beau corps ;
Vous y serez tambour major,
Ferez honneur à votre famille.”

Me retournant les larmes aux yeux,
Aussitôt j’ai mis la main à la plume :
“O Rosalie, ma Rosalie,
Reçois ma lettre avec douleur !
J’ai tant pleuré, versé des pleurs
Qu’elles ont effacé l’écriture !”

Hélas ! que vais-je devenir ?
Je vais me rendre religieuse.
Je vais me rendre religieuse,
Religieuse dans un couvent ;
Je pleurerai mon cher amant,
Le sort de ma tendre jeunesse.”

Les trois conscrits

Nous sommes trois camarades,
Tous les trois jeunes conscrits ;
Le préfet il nous demande
Et le capitaine aussi
Avant de quitter nos belles
Il nous faudra divertir.

Entrons donc sans plus attendre
Dans ce joli cabaret,
De nos charmantes maîtresses
Qu’il nous faut abandonner.
Buvons à pleine rasade
De ce vin rouge et clairet.

L’hôtesse étendit la nappe
En disant : “Que voulez-vous ?
Apportez-nous sur la table
Un bon membre de mouton,
Et aussi du vin pour boire,
Pour faire une collation.”

Adieu, cher père-z-et mère,
Et aussi tous nos parents,
A nos sœurs et à nos frères :
Nous allons au régiment.
Au retour de nos campagnes
Nous serons bien plus contents.

La maîtresse du plus jeune,
Elle se mit à pleurer.
Lui disant d’une voix tendre :
“Cher amant que ferai-je ?
Si tu t’en vas à l’armée,
Je vais mourir de chagrin.

Adieu, chère et bonne mie,
Ne te chagrine donc pas.
Ne te prends pas à folie
De (penser) à vos amants.
Au retour de nos campagnes
Je serai ton cher amant.”

Qui a fait cette chansonnette ?
N’en sont trois jolis garçons.
Ils l’ont faite et l’on chantée,
En revenant du Piémont,
En passant par la grand’rue,
En changeant de garnison.

La mort du porte-enseigne

Le vingt-cinq du mois d’avril,
Soldats de guerre, il faut partir
Il faut partir, soldats de guerre ;
Il faut partir pour l’Angleterre.

Au premier coup d’canon tiré :
“Y a-t-il point de nos gens blessés ?
Oh oui ! oh oui, mon capitaine,
C’est notre joli porte enseigne.

O porte enseigne, mon ami,
N’as-tu pas regret de mourir ?
Tout le regret que j’ai au monde,
C’est de mourir sans voir ma blonde.

Ta blonde, on l’enverra chercher
Par quatre de nos grenadiers,
Par quatre grenadiers de guerre :
Traverseront la mer entière”.

De tant loin qu’il la voit venir,
Son tendre cœur s’est réjoui.
“Réjouis-toi pas tant, ma blonde,
Car ma blessure est trop profonde.

J’engagerai mes diamants ;
J’engagerai mon jupon blanc,
Mon anneau d’or et ma ceinture,
Amant, pour guérir ta blessure.

Mie, n’engage rien pour moi :
Je suis au service du roi ;
N’engage rien pour moi au monde,
Car ma blessure est trop profonde.

Avant qu’il soit demain midi,
Tu me verras ensevelir ;
Tu me verras porter en terre
Par quatre grenadiers de guerre.”

Le pauvre laboureur

Le pauvre laboureur,
Grand Dieu, qu’il a de peine !
Qu’il pleuv’, qu’il vent’, qu’il neige,
Fasse les quatre temps,
Vous le voyez sans cesse
Le laboureur aux champs.

Le pauvre laboureur
(Il a bien du malheur)
Mangeant que du pain d’orge
Pour vendre son froment.
Grand dieu ! qu’il est à plaindre
Le pauvre laboureur !

Le pauvre laboureur
Est habillé de serge.
Il en porte des guêtres
Des genoux jusqu’aux pieds,
Pour empêcher la terre
D’entrer dans ses souliers.

Du ciel j’entends une voix
Qui descend sur la terre
Pour calmer la douleur
Du pauvre laboureur,
Pour calmer la douleur
Du pauvre laboureur.

Noël de Bessans

Dzens qu’éte dins votre mison
Attapi quéme de marmotte,
Ne tsauchez pa votro sapon
Prenez selamin votre socque.

Sortez : defau est tsauza etrandze ;
O zi varréz miou qu‘à midzorn
Sortez, o zi varréz los andze
Que baillon à tui lo bondzorn.

O son lainau su Clapay-vert,
Tot à travers de l’Auille allegra,
Quo floretton un biao motet
To per caou et non pa per lettra.

Corrin demanda à dom Pého
Que sa de latin quarque pou
Qu’o nos expliqué cé mystéo :
Gloria in excelsis Deo.

Elle tsanson quo l’an tsanta
Per to le moin vingt-cinq viadzo,
Mai o nos y sain pas planta,
Neo n’intindian pas sai langadzo.

Demandin lie un pou la grâce
Qu’avant quo quettan ceta place
O la tsantan in Bessanais,
Pa un viadzo, mais dous ou tré.

Dieu d’Amour, que je souffre de peines ! (Extrait)

Dieu d’Amour, que je souffre de peines !

Oh Dieu d’Amour, que je souffre de peines !
Ma maîtresse s’est éloignée de moi.
Elle qui me tenait dans ses chaînes,
Elle me quitte sans savoir pourquoi !

J’avais soin dans sa belle retraite
De garder son troupeau et le mien ;
Je jouais sur ma douce musette
Des airs tendres qui lui plaisaient bien.

Je prenais des baisers sur sa bouche,
Mais pour elle, elle m’en rendait deux.
Oh ! jamais je la trouvais farouche ;
Mille charmes brillaient dans ses yeux.

Malheureux un amant qui s’engage
Sous les lois d’une ingrate beauté !
Qu’il en coûte pour l’apprentissage
Quand la belle a le cœur partagé !

Le galant sans argent

De bon matin me suis levé ;
Le point du jour ne m’a pas trompé.
C’est pour aller voir une fille :
Peut-être un jour sera ma mie.

Quand le soleil se fut levé :
“Belle, allons nous promener,
Nous promener dessus la place ;
Nous y verrons les gens qui passent.”

Quand la belle fut promenée :
“Belle, allons-nous déjeuner ?
Bien le bonjour, madam’ l’hôtesse,
Qu’avez-vous d’prêt pour ma maîtresse ?

J’ai une tranche de jambon,
Et une épaule de mouton,
Et du bon vin dedans ma cave,
Que lui faudra-t-il davantage ?”

Quand fut moitié du déjeuner,
L’hôtesse demande à compter.
“Comptez, comptez, Madam’l’hôtesse :
Laissez déjeuner ma maîtresse.”

Quand fut la fin du déjeuner,
L’hôtesse demande à payer.
Mais le galant qu’a triste mine :
“Avez-vous de l’argent, ma mie ?”

La belle tira son gant blanc
Qui était brodé d’or et d’argent,
D’or et d’argent en abondance :
“Payez, l’hôtesse, en assurance.

Adieu, mon pauvre serviteur,
Tu n’as pas d’quoi charmer mon cœur.
Qui n’a pas d’argent n’a point de mie ;
Adieu, galant, je me retire.

Jamais je ne conseillerai
À un garçon quand je l’aurai
De s’en aller voir une fille
Sans avoir de quoi lui payer chopine.

Réveillez-vous, belle endormie

“Réveillez-vous, belle endormie ;
Réveillez-vous, car il est jour.
Mettez la tête à la fenêtre,
Vous entendrez parler de vous.”

La belle a mis le pied à terre,
Tout doucement s’en est allée.
D’une main elle ouvrit la porte :
“Entrez, galant, si vous m’aimez.”

Mais la belle s’est endormie
Entre les bras de son amant ;
Et celui-ci qui la regarde
En lui voyant ses yeux mourants :

“Oh ! que Dieu bénisse le père
Et la mère qui l’ont nourrie !
C’est la plus charmante des filles
Que jamais mes yeux ont pu voir.

Que les étoiles sont brillantes,
Et le soleil éclatant !
Mais les beaux yeux de ma maîtresse
En sont encor ’ les plus charmants.”

Réveillez vous belle dormeuse
Si ce baiser vous fait plaisir,
Mais si vous étes scrupuleuse,
Dormez ou feignez de dormir.

“Je ne dors pas lorsque je veille ;
Toute la nuit je pense à vous ;
Toute la nuit mon cœur sommeille ;
Mon bel ami, marions-nous.”

Complainte du chaudronnier

Ecoutez, je vous en prie,
Jeunes, vieux, petits et grands,
Hommes, garçons, femmes et filles,
Tous les rich ’ et indigents.
Venez voëre le supplice
Et les horribles tourments
Qu’il faudra que je subisse
A la fleur de mes beaux ans.

Dès ma plus tendre jeunesse,
J’ai pris un mauvais chemin
En méprisant père et mère
Comme un vrai libertin.
En avançant dedans l’âge
Je viens toujours plus méchant :
Je m’abandonne au pillage,
Ce qui cause mon tourment.

Par ma mauvaise conduite,
Je fus chassé du pays.
Tout d’abord j’ai pris la fuite
Par la crainte d’être pris.
Je m’en vais en pays d’Aoste
Pour exercer mon métier,
Emportant dedans ma hotte
Les outils d’un chaudronnier.

Je m’en vais d’abord en ville
En cherchant à travailler.
Je cachai ma malice
Le dessein que j’ai formé
De voler dedans l’église
De la paroisse d’Introd ;
Ce fut par mon artifice,
J’en suis devenu à bout.

Je suis entré dans l’église
Comme un vrai déterminé,
Où j’ai pillé sans remise
D’abord les vases sacrés.
Sans avoir de Dieu la crainte
Ni pour lui aucun respect,
Et m’en vais à Villeneuve
Pour y fondre cet effet.

De mes crim ‘ et mes offenses
Le grand Dieu fut irrité
A permis par sa puissance
Qu’enfin je fusse arrêté.
D’abord dans la ville d’Aoste
L’on me conduit en prison :
C’est afin que je déclare
Tant de noires actions.

Ah ! la justice équitable,
De m’avoir examiné !
Pour mes crimes et mes offenses
D’abord j’ai été condamné
De me voir la main coupée :
C’est pour punir mon péché.
Malheureuse destinée
D’être pendu et brûlé.

Devant l’église de Notre-Dame
Une torche est allumée
Pour faire amende honorable
Devant toute l’assemblée.
L’on me conduit sur la place
Qu’on nomme la place du Plot :
C’est pour punir mon audace,
Je suis conduit des bourreaux.

Considérez-donc, mes frères,
Comme le crime est puni.
Apprenez, par mon exemple,
Apprenez tous à souffrir.
Pour le repos de mon âme
Dites un de profundis :
Que Dieu me fasse la grâce
De me mettre en Paradis.

J’ai perdu ma maîtresse

Julien Tiersot
J’ai fait une maîtresse
Trois jours y a pas longtemps.
Mais par mon peu d’adresse,
L’autre jour,
J’ai perdu ma maîtresse
Au point du jour.

Où irai-je me plaindre
Moi, pauvre infortuné ?
J’irai-z- au vert bocage
M’y cacher,
Pour entendre le rossignol
Chanter.

Rossignolet sauvage,
Le messager des bois,
Apprends moi ton langage
Et ta chanson ;
Donne moi des nouvelles
De Françon.

Françon est bien malade,
En danger de mourir.
Françon n’est pas malade,
Ce dit-on :
Regrette en mariage
Un beau garçon.
Adieu, Françon ma mie,

L’objet de mes amours.
J’irai-z-en Italie
Finir mes jours.
Adieu, Françon ma mie,
Pour toujours.

L’amour et le vin

“Rare beauté, que mon cœur vous aime !
Nuit et jour je ne pense qu’à vous.
À mes yeux que vous êtes jolie !
Mon bonheur ne dépend que de vous.

Si vous m’aimez, je vous aime guère ;
Cherchez ailleurs à vous marier.
Faites, faites d’autres maîtresses,
Car pour moi y a plus rien espérer.

Tu n’as pas toujours dit ça, la belle,
Car tu n’avais que moi d’amant.
À présent, la moindre nouvelle
Fait changer d’amant tous les ans.

Combien de fois j’ai passé la rivière
Pour sauver ton troupeau du loup !
Maintenant voilà la récompense,
Belle, que je reçois de vous.

Buvons, trinquons, caressons la bouteille,
Un verr’ de vin vaudra mieux que d’aimer.
C’est en buvant que l’on fait des merveilles ;
En aimant l’on est bien languissant.

La Mie Ressuscitée

“Rossignolet du vert bocage,
Oh ! je t’en prie, console moi.
On dit que ma mie est malade :
Oh ! permets moi d’aller la voir.

Non, ta mie, n’est pas malade,
Elle est guérie de tout mal.
Elle est morte et enterrée.
À elle il n’y faut plus penser.

Si ma mie est enterrée,
Hélas ! grand Dieu ! que ferai-je ?
J’irai pleurer dessur sa tombe,
Pleurer son sort, pleurer le mien.”

J’ai tant pleuré, versé des larmes,
Que ma mie s’est réveillée
“Réveille-toi, bouche riante,
Réveille-toi et parle-moi !

Comment veux-tu que je te parle ?
Je n’ose plus te regarder.
Mon visage est couvert de terre,
Le tien est frais comme un bouquet !»

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